Et c’est même très fréquent en France où l’on ne s’est jamais vraiment remis de la révolution française : tout ce qui ressemble de près ou de loin à un abus d’autorité nous hérisse, à tel point que lorsque je demandais à ma fille de 7 ans de vider le lave-vaisselle elle me répondait : « je ne suis pas ta bonniche ! ».

Elle avait déjà intégré que « faire quelque chose pour l’autre c’est rabaissant ! »

Où va-t-elle chercher tout ça ?!

En fait on se traîne culturellement une confusion entre :

  • Être Servile : être réduit à l’état d’esclave comme l’était les serfs vis à vis des nobles

Et

  • Être au service : faire plaisir, aider

Un grand patron de restauration faisait le distinguo entre SERVEUR et SERVITEUR, pour lui toute la noblesse du métier de serveur c’était de permettre au client de « passer un moment de rêve », là où un serviteur ne fait que répondre à des injonctions : « une carafe d’eau ! », « du sel ! », « du pain ! », conséquences de son manque de professionnalisme

J’avais jadis une collaboratrice qui était une excellente commerciale, douée d’un sens du service, comment dire… « limité », limité à ses clients et au cadre de la transaction marchande qu’elle établissait avec eux. Mais dès qu’il fallait « aller plus loin », faire le geste, le sourire de plus qui n’était pas compris dans le prix il n’y avait plus personne !

Quand je lui ai dit qu’elle n’avait pas de valeur « service client », elle était outrée parce qu’elle confondait cela avec une valeur commerciale. Certes ses clients étaient bien servis dans le cadre de ce qui était contractuellement conclus mais une valeur service cela va bien au-delà de ce qui est prévu dans la transaction. Le service, c’est un état d’esprit qui fait « faire plus », mieux, au-delà du prévu, du contractuel.

C’est une manière d’être qui consiste à chercher à satisfaire par toutes les attentions possibles, à résoudre, à faire preuve d’empathie, comme on le fait avec ses invités ou sa famille et ce n’est pas si fréquent.

Depuis elle a compris la différence et c’est une perle en matière de service, de souplesse, de disponibilité et d’attentions … « gratuites » 😉

Combien j’ai croisé de vendeurs en formation qui étaient choqués que je leur conseille d’orienter le client vers un concurrent qui avait le produit recherché quand eux-mêmes n’étaient pas capables de répondre à la demande. Certains ne comprenaient pas la logique : « soit je vends ce que j’ai, soit le client se débrouille ! ».

 Alors qu’un client que l’on aide en dehors de toute objectif marchand, pour résoudre son problème ou satisfaire ses attentes est un client fidélisé pour longtemps.

Pour se convaincre du décalage entre valeur commerce et valeur service il suffit de compter le nombre de mauvaises expériences que nous avons tous à partager dès que nous avons eu une attente qui sort légèrement de l’ordinaire au restaurant, à l’hôtel ou dans un magasin, confrontés alors à un manque total d’empathie parce notre demande ne rapportera rien de sonnant et trébuchant à ce commerçant, voire parce qu’elle est « hors process », ou hors norme.

Former des vendeurs c’est bien, mais avant d’acquérir la moindre technique il faudra probablement valider au recrutement que ce candidat au commerce (et donc au service) a avant tout l’envie de faire plaisir, de servir et qu’il ne considère pas que c’est avilissant… et ça c’est pas gagné !


C’est une espèce tellement rare que dans certaines entreprises on les a sélectionnés et placés dans une sorte de réserve (comme les indiens) : le SERVICE CLIENT… ce qui d’ailleurs a pour conséquence parfois de finir de responsabiliser tous les autres personnels en relation avec le client : « nous on fait du business, le service c’est les autres ! ».

Bref je rêve d’un monde où SERVIR retrouverait ses lettres de noblesse… attention, rien à voir avec la révolution ! 😉

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