« Chose promise, chose due » : on a appréhendé dans un précédent article la différence entre l’erreur et la faute, du coup on peut passer au plus rigolo : le rappel d’une règle en cas de faute… j’ai dit « rigolo », pardon c’est involontaire car si vous y prenez du plaisir il faut consulter d’urgence !
Rappeler une règle cela demande 3 choses essentielles :
- 2 secondes de courage (pour 6 mois de confort),
- se défaire d’un fantasme
- et un soupçon de technique.
Deux secondes de courage car il vaut mieux être « dur à temps que cruel trop tard », plus j’attends plus ce sera difficile à faire : soit je me sens de moins en moins légitime (pourquoi dire maintenant alors que j’ai laissé passer les fois précédentes ?), soit je risque d’exploser pour lui « faire payer » d’abuser de ma patience.
Se défaire de quel fantasme ? Celui d’une réponse : responsable, positive et coopérative d’un collaborateur pris les mains dans le chocolat, celle dont on rêve comme : « Merci, merci parce que je file un mauvais coton et que ton recadrage me permet de revenir dans le droit chemin », celui ou celle qui vous répond ça vous le mettez sous cloche car il va intéresser les sciences humaines pour les 20 ans à venir !
La réaction d’un collaborateur à qui on signale un hors-jeu est rarement glorieuse : elle se déplace sur un spectre qui va de pitoyable à grotesque en passant par les couleurs de la provocation ou de la mauvaise foi.
Entre :
- celui qui va nier les faits,
- celui qui va se justifier,
- celui qui va comparer avec les autres,
- sans parler de celui qui va pleurer ou se taire,
on a toutes les réactions révélatrices de ce qu’un cerveau humain pris sur le fait peut produire : « l’individu fait ce qu’il peut à l’instant t pour réduire son malaise ».
Il faut donc pour que cela ne dure pas des plombes considérer que ce n’est pas le sujet, là encore prenons exemple sur la maréchaussée : vous pouvez lui expliquer « qu’un oiseau est passé juste devant le feu tricolore au moment où vous passiez et que vous n’avez, de fait, pas pu voir sa couleur » : il s’en fout il n’est pas là pour ça.
Dans le cadre d’une faute, on n’est pas là pour « culpabiliser l’autre de ne pas avoir de « bon motif » », pour « discuter des raisons de la faute et de leur validité» ou pour « lui faire la morale », on est juste là pour rappeler une règle utile pour le bon fonctionnement de l’organisation ou le respect des valeurs de l’entreprise.
Alors arrêtons de jouer à « Feuille, Pierre, Ciseau » avec les justifications :
-« Vous êtes en retard : Feuille ! »
-« Oui mais il y avait grève des bus : Ciseau ! et le Ciseau coupe la feuille ! »
Quelques semaines plus tard :
– « Vous êtes en retard : Ciseau ! »
– « Oui mais il y avait un bouchon sur la route : Pierre ! et la Pierre casse le ciseau ! »
En fait la justification n’a aucun intérêt, c’est toujours une « bonne raison » pour lui et une « mauvaise » pour moi.
Donc pour faire simple et court : je le laisse raconter « sa life.com », SANS L’INTERROMPRE : sinon je remets 10 balles dans le Jukebox de la polémique ; et dès qu’il s’arrête : je rappelle la règle en gardant à l’esprit que ce que l’on recadre c’est un comportement et non le collaborateur (le plus simple d’ailleurs pour éviter toute confusion étant de prononcer le mot « comportement »).
Évitons donc – toujours pour ne pas perdre de temps – toute croisade moralisatrice sur les valeurs de type : « Ce retard est un total irrespect vis-à-vis de tes collègues ! », la valeur donne certes du sens à la règle mais on ne juge pas le collaborateur de ne pas posséder la valeur, juste d’être hors-jeu vis à vis d’une règle : « Je veux bien entendre que je suis en retard, mais pas que je manque de respect aux autres ».
Imaginez un policier qui vous reprocherez de « manquer de civisme » après une incivilité routière… je pense que vous lui parleriez -entre autres – des impôts que vous payez ou de ce que vous faîtes pour les Restos du cœur ! Comme il n’a pas envie lui aussi d’y passer des plombes il reste centré sur votre comportement en dérive par rapport à la règle.
Voilà pour aujourd’hui, la difficulté pour tester la cette technique c’est qu’il faut trouver un collaborateur en faute, mais ça c’est à vous de vous débrouiller pour… je ne peux pas tout faire !
Ah oui, j’oubliais, un détail :
- « Vous êtes en retard ! »
- « Je suis désolé mais j’ai dû exceptionnellement emmener les enfants à l’école car mon mari a conduit l’aîné à l’hôpital car il a l’appendicite »
- La seule réponse possible est : « Filez à l’hôpital ! », ça s’appelle un cas de force majeure et normalement c’est une fois… en tous cas pour cet enfant-là !